La réussite de Cheika, c'est aussi de savoir parfaitement utiliser Giteau
COUPE DU MONDE - Atteignant les 100 sélections, homme de base du système Cheika, véritable baromètre du jeu des Wallabies, Matt Giteau s'est imposé comme un acteur clef du succès australien dans cette Coupe du Monde. Le tout, en 6 petits matchs seulement. Mais comment Giteau est-il (re)devenu un joueur majeur pour les Wallabies ?
Une association avec Foley peu évidente
Il était bien difficile, voire impossible d'imaginer il y a quelques mois que Foley et Giteau seraient associés en Angleterre. Si l'ouvreur a gagné sa place malgré la concurrence de Cooper, Toomua ou Leali'ifano, le cas de Matt Giteau était bien plus incertain. Condamné, d'abord, à regarder le Mondial à la télévision, la Fédération australienne a voté une dérogation visant les joueurs ayant plus de 60 sélections et 7 saisons en Australie.
Une "Loi Giteau" qui permet au Toulonnais de renouer avec la sélection. Une association peu évidente aussi sur le papier, entre deux joueurs au gabarit proche (1m78, 85 kilos pour Giteau contre 1m82, 89 kilos pour Foley) mais qui fonctionne : 6 associations, 6 victoires. Et face à la Nouvelle-Zélande, l'Angleterre, le pays de Galles, les Fidji ou encore l’Écosse.
Là pour faire jouer les autres
Si son association n'était pas évidente avec Bernard Foley, les deux joueurs arrivent à parfaitement jouer ensemble. L'ouvreur des Waratahs mène le jeu, mais il peut s'appuyer sur un véritable second ouvreur (le fameux 5/8e chez nos amis anglo-saxons). Giteau devient ainsi l'ouvreur de substitution wallaby sur les 2e ou 3e temps de jeu. Exemple sur le premier essai australien face à l’Écosse : Matt Giteau se mue en dix pour trouver Foley en position de centre. Une façon de rentabiliser les longues passes de Giteau et de décharger Foley de la pression mise par la défense.
Un rôle de second ouvreur qui se traduit aussi dans le jeu au pied : Giteau gaucher, Foley droitier, l'ancien des Brumbies est utilisé en alternance pour son jeu d'occupation. Avec une moyenne de 7 coups de pied par match (pour 8,5 passes), il dépasse allègrement la moyenne des autres centres de cette Coupe du monde comme Nonu (2,75), Fofana (1,25) ou encore De Allende (0,25).
La volonté de garder son joyau intacte
L'Australie met en place un système défensif fait pour préserver Giteau le plus possible. Exemple sur les touches, où le joueur du RCT va se placer dans le couloir des 5 mètres. Si l'alignement est complet (8 avants concernés), un ailier ira le suppléer au centre du terrain. Sur un alignement réduit (entre 3 et 7 avants), c'est un troisième ligne (Hooper) qui remplira le rôle de centre sur le premier temps de jeu. Une manière intelligente de préserver Matt Giteau des charges de Roberts, Burgess ou encore Lovabalavu lors des matchs précédents.
Une tactique qui se traduit dans les chiffres : face aux Fidji, Giteau affiche un faible rendement (4 plaquages, 2 échecs) quand Horne, l'ailier se muant en centre défensif, s'emploie : 13 plaquages. Idem pour Beale face à l'Angleterre (8 plaquages) ou encore Adam Ashley-Cooper (6 plaquages) face au pays de Galles. Le meilleur moyen de garder la tête froide est d'éviter de la mettre n'importe où.
Moins scoreur, encore meilleur
Preuve enfin que Giteau s'est intégré à ce collectif en acceptant un rôle différent : depuis son retour, le numéro 12 n'a inscrit que 5 points en 6 matchs. Un chiffre honorable pour n'importe quel joueur mais qui détonne au regard de ses statistiques habituelles. Cela faisait près de 9 ans que le centurion n'avait pas connu une période si peu prolifique. Il faut remonter à 2006-2007 pour le voir aussi peu marquer sur 5 matchs. Mais ça n'était jamais arrivé à Giteau de marquer 5 points en 6 matchs depuis… ses 6 premières sélections. Un aspect de son jeu moins individualiste, peut-être, qui se traduit par une moyenne de mètres gagnés par match faible : seulement 15,75m par rencontre.
En conclusion, Matt Giteau reste le cerveau de cette équipe australienne. Un joueur qui, sans avoir les jambes de ses 20 ans reste un acteur majeur sur le plan international. Et si l'Australie est aujourd'hui en demi-finale, elle le doit autant aux choix risqués de Cheika (Pocock en 8, Genia imposé bien qu'en méforme au début du Mondial), qu'au système brillant qu'il a mis en place. Une bonne manière de construire une équipe autour d'un joueur qui peut faire basculer le sort d'une rencontre.
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