La chronique d'Henry Broncan

Par Rugbyrama
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Dans sa chronique, le directeur du rugby agenais Henry Broncan évoque largement le trophée des clubs champions d'Europe de rugby à 7 disputé par les champions de France Espoir du SUA en Russie... Mais aussi l'affaire Bastareaud, qu'il a découvert à son retour des contrées de l'Est.

Jeudi 25 juin

13 Agenais sur la ligne Toulouse- Francfort, 10 joueurs dont Sofiane Guitoune le capitaine, Maxime Carabignac le leader de jeu, le docteur Pierre Etienne Bord à l'aspirine, Frédéric Bourdheil à la stratégie et Henry au management. Marie, l'intendante générale de l'Association, a, comme une bonne mère, consigné ses recommandations sur une dizaine de 21-29,7 - une saine lecture pour les deux premières heures de vol de la Lufthansa - après s'être démenée, deux semaines durant pour recueillir passeports, passeports provisoires et visas. Heureusement pour elle, l'agence de voyage dirigée par Mickaël Chenu s'est également multipliée pour favoriser un déplacement "préparé" dans l'urgence, et un grand merci à René Hourquet pour son assistance.

C'est à Moscou que nous représentons la France et la FFR en tant que détenteurs du titre national Espoirs à sept pour aller disputer le trophée des clubs champions d'Europe de rugby à 7. Les épreuves du baccalauréat nous privent de Brice Dulin et Pierre Dandria, un genou douloureux laisse Thomas Lamoulie chez les Cadets de Casteljaloux ; Michel Denêtre nous a quittés pour rejoindre la cathédrale d'Albi et son grand prêtre Eric Béchu ; enfin Rawaqa, notre meilleur des joueurs lors du tournoi de Bayonne est reparti aux Fidji. Les forfaits ont fait le bonheur des Crabos Alexi Bales et Romain de Cottignies ainsi que celui du demi de mêlée des Reichel, Yohan Château Raynaud. Malgré les défections, le moral est bon même si, depuis plus d'un mois, nos joueurs sont au repos, à peine avons-nous trottiné à trois reprises pour tenter de retrouver quelques sensations : nous payerons cher ce manque de préparation devant des adversaires déterminés, eux, en pleine saison, et férus de rugby à 7. Dans notre pays, même en rugby, nous sommes toujours en retard d'une guerre !

Longue escale de plus de 4 heures à Francfort avant les 3 heures qui vont nous conduire sur l'aéroport de Domodavo situé à une bonne cinquantaine de kilomètres de Moscou .Arrivé morose : très longue file d'attente pour le contrôle des visas. Plus d'une heure pour atteindre les tamponneurs du guichet et une heure supplémentaire de traitement spécial pour Sofiane titulaire d'un passeport … algérien.

Douane franchie, dans le hall de l'aéroport, nous sommes assaillis par nombre de taximen parmi lesquels il nous faut jouer des coudes pour s'ouvrir le passage. Dehors, nous attend la pluie mais pas le bus. Heureusement une jeune guide adorablement anglophone nous déniche et nous fait comprendre qu'il faut patienter encore un peu. C'est donc au-delà de minuit, heure locale que nous gagnons l'immense hôtel Astrus et ses 33 étages. Tant pis pour mon rendez-vous avec le meilleur restaurateur français de Moscou, Michel Desseaux, originaire de Moissac. Nouvelles et longues formules administratives avant de pouvoir bénéficier de nos clés et nouvel examen obligatoire devant les vigiles de l'hôtel renforcés par deux policiers. Tout au long du séjour, le déploiement numérique de ces derniers ne manquera pas de nous impressionner. Rien n'étant prévu pour se sustenter à cette heure trop tardive, c'est avec des ventres grondeurs et des esprits chagrins que nous gagnons nos chambres.

Vendredi 26 juin

Latitude impose, dans cette fin juin, les nuits sont encore bien plus courtes en Moscovie qu'en Agenais. A trois heures du matin, les rideaux mal tirés laissent place à la lumière. Sommeil d'autant plus interrompu que sur l'avenue à dix voies qui longe l'Astrus hôtel - un hôtel construit sous l'ancien régime et en cours de restauration - des convois de gros camions font tant de bruit qu'on les croirait dans la chambre. Rassurons c'est la fin des grogneries !

La réconciliation avec la Russie débute au petit déjeuner, l'équivalent d'un repas de midi : viandes froides, variété de légumes, salades, beignets (ponchiki), gâteaux divers plus ou moins accompagnés de Chantilly et de crème fraîche... Pas très recommandé avant d'aborder le footing obligatoire dicté par Frédéric. A l'extérieur, découverte de tours immenses, quelques unes en décrépitude, les autres plus modernes, une bonne trentaine d'étages alignés sans aucune fantaisie. Entre eux, de larges espaces verts et des bosquets, parfois de grands bois de bouleaux. Le rythme des jeunes fait décrocher le toubib et le manager. Autre agréable surprise : l'impeccable propreté des lieux.

L'ancien seconde ligne du SUA, maintenant castrais, Kirill Koulemine, en vacances de rugby et donc de retour dans la banlieue nord, a traversé la capitale - douze millions d'habitants et une diagonale longue de 80 kilomètres – pour venir nous saluer. Nos petits l'inondent de questions, surtout pas sportives bien sûr. Kirill me transmet l'invitation de son père pour participer à l'anniversaire de ce dernier, dans son isba, à l'écart de la grande couronne. Pris impérativement par le tournoi, je regrette de ne pouvoir acquiescer à cette demande. J'aurais bien aimé m'immiscer une journée complète dans l'âme slave.

L'après-midi, le comité organisateur met à notre service, un jeune étudiant – nos garçons auraient préféré une Nathalie – pour nous guider dans le centre de Moscou. Voyage en métro et surprise de découvrir de véritables oeuvres d'art sous terre. Max nous explique que c'est Staline, en 1930, qui avait eu pour idée de faire un métro qui impressionnerait tous les voyageurs "un véritable paradis sous terre" à défaut de l'autre. C'est bien sûr le Kremlin et la place rouge qui retiennent notre attention. Aux abords, les touristes se font photographier auprès des sosies plus ou moins ressemblants de Staline, Lénine et même Trosky. Petite déception : c'est jeudi et la place Rouge est interdite à tout sillonnage ; tant pis pour la visite du mausolée. Notre troupe se console en parcourant le Goum et sa boutique de luxe aux prix pour le moins occidentaux .Les belles slaves, taille fine, la robe ou la jupe, longues jambes et hauts talons, coquettes, coquines, font chavirer les yeux et le coeur de nos Espoirs .Ils ont raison d'en profiter : demain sera un autre jour !

Retour à l'hôtel. Ce dernier accueille tous les participants au Tournoi. Les gabarits et les musculatures de nos futurs adversaires impressionnent mes petits presque autant que les yeux bleus du personnel féminin. Pourtant, l'optimiste règne encore : "iIs ne doivent pas savoir jouer au rugby !". Heureux de rencontrer un Français dans l'Hôtel ; originaire de Bourg-en-Bresse, passé par Voiron et Cannes-Mandelieu, Ducoulomb entraîne les pros de Krasnoïarsk, club de Sibérie, celui de Sergueev et de Gratchev, 4200 Kms de Moscou, encore plus loin qu'Agen, quatre heures de décalage horaire. Une discussion passionnante : on ne peut jouer au rugby que de juin à octobre mais on a pu se payer un stage d'avant-saison en mars, au CREPS de Boulouris puis fin avril, à la Grande-Motte ; les salaires sont relativement modestes, de 1000 à 2000 euros, ce qui dans le pays est quand même fort appréciable car bien au-dessus du niveau de vie moyen. La principale vedette – nous en reparlerons - "touche" 3500 euros. C'est un autre entraîneur français, Panzavolta, qui a sollicité mon interlocuteur pour le rejoindre dans une aventure qu'on devine fraîche et passionnante. Cette saison, deux seconde ligne, l'un de Nice, l'autre de Grasse, tentent l'aventure auprès d'eux ; en novembre, ils reprendront, en cours, nos championnats. Krasnoïarsk vient dans le tournoi bien décidé à contester l'hégémonie des deux clubs moscovites le VVA Podomoscovie tenant du trophée, et le Yug-Krasnodar spécialiste du rugby à 7. Et nous, croit-on encore ? Ludovic bombe son torse, Thibaut gonfle ses biceps.. Bonne nuit.

A propos de bonne nuit, des demoiselles de la nuit occupent le bas, à deux pas des policiers. Où sont les caméras ?

La suite de la chronique d'Henry Broncan ce jeudi...

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