La chronique de P. Villepreux

Par Rugbyrama
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Notre expert Pierre Villepreux livre son analyse sur le projet de jeu du XV de France aperçu en Ecosse et contre l'Irlande.

Les Tricolores ont dévoilé en deux matchs une partie de leur projet de jeu. Le jeu à la main est prioritaire.

Au moment du plaquage donc de l'arrêt du mouvement du ballon, le mouvement collectif de pénétration ayant créé les conditions optimales pour déplacer le jeu sur la faiblesse défensive, c'est bien sur la vitesse de libération du ballon qui sera déterminante pour que le mouvement se déplace et avance dans un autre espace. Le jeu au pied reste l'alternance incontournable quand le premier n'est plus possible

Tout ballon, quelle que soit la position dans l'espace de jeu, est jouable si les conditions sont réunies pour le faire. La zone en but 22m n'est plus un espace de non jeu. Y compris dans cette partie du terrain tout le monde se doit d'être concerné.

Celui-ci, certes, n'est encore pas complètement maitrisé, mais certaines séquences de jeu lors de ce dernier match ont été significatives de la communion qui commence à exister entre le porteur de balle et ses partenaires, ceux qui sont les plus proches bien sûr mais aussi les autres un peu plus éloignés de la cellule d'action (dans ce cadre le 2° essai de Clerc est caractéristique). Cette cellule devient référentiel pour tous et guide les déplacements et replacements qui permettront d'assurer la continuité du jeu en avançant sans passer, autant que faire se peut, par le sol et quand, c'est le cas, la balle doit être libérée avec rapidité, en tout cas avant que le replacement défensif des adversaires ne soit total.

Ce jeu peut sembler quelquefois désordonné et ne pas répondre aux canons d'un rugby posé et rigoureusement organisé, celui qui rassure et semble efficace mais manque forcement de richesse, puisque dans ce type de jeu, le potentiel tactique et technique des joueurs est moins sollicité. Ils sont contraints de jouer sur un registre limité d'où l'on ne sort jamais ou rarement.

Pour avoir suivi le match à coté d'un Italien plutôt branché foot que rugby, j'ai pu apprécier combien le jeu des français lui paraissait désordonné relativement à celui des Irlandais plus structuré. Il voyait dans ce désordre non pas de la maîtrise mais de la chance surtout bien sûr quand un essai concluait le jeu français. Nous ne donnions pas le même sens aux mêmes actions et manifestement je ne l'ai pas complètement convaincu en lui expliquant que les Français, s'ils avaient joué un jeu plus "ordonné" n'auraient certainement pas marqué quatre essais.

La révolution invisible pour aller vers la maîtrise toujours plus grande du désordre appartient aux joueurs. C'est justement quand ils sont revenus à un jeu plus conforme et qu'ils ont rendu le ballon aux Irlandais que leur supplice a commencé. Un élément d'explication réside peut être dans une fraîcheur physique peu à peu perdu du fait des contraintes de déplacement qu'impose le jeu choisi.

Mais même s'ils étaient dans "le rouge", il est évident que la décision plus que contestable de l'arbitre d'accorder un essai de pénalité a terriblement affecté le mental des Bleus. Il faut accepter aussi que l'adversaire ait fait le bon choix à partir de la 60e minute en décidant de jouer avec des ballons portés. Ce jeu fut révélateur de la faiblesse française et a été parfaitement exploité jusqu'à la fin du match.

Je ne partage pas du tout l'avis de Jack White ni d'Eddie Jones qui pensent qu'il conviendra contre l'Angleterre de revenir à un jeu plus académique. Il convient aujourd'hui au contraire de rester cohérent par rapport à un jeu qui a été produit jusqu'à présent et qu'il s'agit de continuer à développer en quantité et avec une qualité accrue. Tous les joueurs français semblent avoir entendu le message et semblent partager les convictions du staff et les résultats, somme toute, doivent les conforter les uns et les autres pour aller plus loin.

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