Skrela: "Le VII n’attire pas encore assez en France"

  • Jean-Claude Skrela - 30 janvier 2014
    Jean-Claude Skrela - 30 janvier 2014
  • L'équipe de France à VII à l'échauffement - Tournoi de Londres - 11 mai 2014
    L'équipe de France à VII à l'échauffement - Tournoi de Londres - 11 mai 2014
Publié le Mis à jour
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Dans les couloirs de Twickenham, Jean-Claude Skrela a pris le temps de se livrer. A l’issue du dernier tournoi du circuit mondial de VII de la saison à Londres, le manager revient sur les faiblesses des Bleus, ses espérances pour la saison de qualification aux Jeux Olympiques, sa difficulté à recruter des joueurs, ou le manque de crédibilité du rugby à VII en France. Sans langue de bois.

Quel est le sentiment qui domine à l’issue de ce tournoi de Londres ?

Jean-Claude SKRELA: C’est celui de toute la saison: il est mitigé. On pourrait dire qu’on est satisfait, parce qu’on gagne une Bowl en Ecosse une semaine plus tôt, qu’ici on joue un quart de Cup qu’on perd à deux points (17-19, contre les Anglais, NDLR) en jouant bien, et puis qu’ensuite on est défaits contre le Kenya en demi-finale de Plate alors que, menés 21-0, on revient à 21-19 (28-19 au final). C’est un bilan mi-figue, mi-raisin. Cette année, on a eu beaucoup de problèmes à gagner des matchs qui étaient à notre portée. Le défaut de notre saison se trouve dans notre capacité à concrétiser toutes nos occasions. Quoi qu’en pense le rugby français, ce jeu est très exigeant techniquement et physiquement. Il faut que nos joueurs prennent conscience du très haut-niveau. Je veux dire que, lorsque l’on est dans l’intensité maximale, c’est là qu’il faut être fort. Nous, on n’en est pas encore là. Mais quand je vois leur match contre l’Angleterre, ils peuvent le faire.

L’année prochaine, celle de la qualification pour les JO, vous inquiète-t-elle ?

J.-C.S.: Non, au contraire. Elle me passionne et me motive. J’espère qu’il en est surtout de même pour les joueurs. […] Cette année, on a été en très grandes difficultés, parce que l’on a eu beaucoup de blessés. On n’a pas pu être dans la continuité du travail. Sur certaines séquences d’entraînement, on a travaillé à vraiment peu. On a aussi de grandes difficultés à avoir des joueurs des clubs. Ils ne veulent pas libérer des joueurs pour le rugby à VII. Je tairais des noms. Je trouve dommage que l’ensemble du rugby n’ait pas encore compris que, après-demain, le rugby sera représenté aux Jeux. Et que ça pourrait rejaillir sur l’ensemble du rugby français. Maintenant, on ne va pas pleurer. On va travailler avec les gens qui ont envie de venir. En espérant que l’on est beaucoup moins de blessés la saison prochaine pour travailler la continuité et trouver des automatismes.

Augmenter l’effectif est-elle une des solutions pour optimiser les entraînements ?

J.-C.S.: On veut faire venir d’autres joueurs pour amener le groupe à 18-19. C’est le minimum. Déjà, pour ne pas vivre la saison qu’on a vécue cette année. Et aussi mettre un peu de concurrence. C’est-à-dire que ceux qui ne seront pas performants ou feront trop de fautes resteront à la maison. […] Ensuite, à l’entraînement, on veut aussi organiser des oppositions qui permettront de travailler sur le collectif, avec le pôle France et les -20 ans en stage à Marcoussis. Et puis, au-delà de ça, il faut qu’il y ait, de la part des garçons, une prise de conscience collective qu’ils peuvent réussir des choses. Je ne suis pas sûr à 100% qu’ils soient convaincus qu’ils peuvent battre les grandes équipes.

Ce que je comprends difficilement chez certains, c’est que les Jeux Olympiques ne les transcendent pas

Concrètement, où en êtes-vous sur le dossier du recrutement ?

J.-C.S.: J’espère qu’on pourra finaliser les dossiers des deux-trois joueurs qui ont evolué avec nous dans l’année et qui ont envie de venir. Pour Virimi Vakatawa, c’est bien avancé. On a rendez-vous très bientôt, je pense que ça se conclura. Par contre, pour Paul Bonnefond, c’est dommage pour nous. Je pensais qu’il viendrait, et puis il a signé à Lyon, ce n’était pas prévu au programme. […] Quant à Jérémy Aicardi, on le veut, si… (l’ancien Oyonnaxien a signé un pré-contrat à Nevers en Fédérale 1, NDLR). [….] Après, à nous de trouver un ou deux autres joueurs de plus. Il y a de bonnes pistes. Je ne peux pas encore vous donner les noms, j’espère qu’elles vont se concrétiser. […] Mais il y a beaucoup de joueurs avec qui j’étais en contact, dès que les gens l’ont su, d’autres clubs les ont fait signer…

Qu’est-ce qui vous empêche, aujourd’hui, d’attirer plus de rugbymen ?

J.-C.S.: Les joueurs ne veulent pas venir. Ils peuvent avoir peur de ne pas retrouver leur place à XV par la suite. Le VII ne leur donne pas une garantie pour "l’après". Mais c’est "le pendant" qu’il faut qu’ils viennent vivre. Après, on pourrait dire qu’il y a le salaire, certainement. Mais je connais certains salaires de Pro D2 ou Top 14, ils ne sont pas tous comme l’élite, et parfois en dessous de ce qu’on propose. Il faut savoir que, sur le circuit mondial, la France est plutôt dans les premières en termes de salaires. […] Mais on va sûrement augmenter la masse salariale pour aller à 18 joueurs. Après, la question c’est de les trouver. […] Je pense que le VII n’attire pas encore assez, ou n’a pas une crédibilité qui fait qu’on ne se sent pas joueur de rugby à VII. […] Ce que je comprends difficilement chez certains, c’est que les Jeux Olympiques ne les transcendent pas… Ça veut dire que les joueurs sont dans leur petit confort dans leur club, ils n’aiment pas trop tenter une aventure. Parce que le VII est un mode de vie. Quelque part, on est des nomades. Cette culture n’est pas assez répandue sur notre territoire. Pourtant, à l’avenir, il ne faudra pas que le VII devienne concurrentiel du XV. J’aimerais qu’il devienne complémentaire, mais on ne l’a vraiment pas compris.

L'équipe de France à VII à l'échauffement - Tournoi de Londres - 11 mai 2014
L'équipe de France à VII à l'échauffement - Tournoi de Londres - 11 mai 2014
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