"Je ne serai jamais Trinh-Duc"

Par Rugbyrama
  • Jonathan Wisniewski Racing-Metro Top 14 2010
    Jonathan Wisniewski Racing-Metro Top 14 2010
Publié le Mis à jour
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Il n'aurait pas dû partir pour les Etats-Unis. La blessure de Benjamin Boyet a propulsé Jonathan Wisniewski parmi France A. L'ouvreur du Racing-Metro sera même titulaire pour affronter l'Uruguay ce mercredi soir, et il revendique sa différence. Rencontre.

Alors que vous ne figuriez pas dans la première liste des 26, vous voilà titulaire pour affronter l'Uruguay. Surpris ?

Jonathan WISNIEWSKI : Effectivement, je pensais que Lionel Beauxis allait démarrer. Mais je ne me pose pas plus de questions que si je n'avais dû jouer que les cinq dernières minutes. J'ai la chance d'attaquer la partie, c'est un honneur. Je n'ai qu'une envie, c'est prendre un maximum de plaisir. Les coachs ont un discours ambitieux, différent de celui que j'ai connu en club. Avec le Racing-Metro, nous étions promus, nous avons longtemps vécu avec la pression du maintien. Là, la Fédération demande des résultats, mais veut aussi une certaine ambition dans le jeu. Et c'est tant mieux.

Voyez-vous votre sélection comme la récompense de votre saison en club, ou un tremplin pour viser plus haut ?

J.W. : Je ne me pose pas la question. On voit bien que nous sommes dans l'antichambre du XV de France, la sélection de Lionel Mazars en est la preuve. Moi, je suis un rescapé, puisque je ne suis là qu'à cause, ou grâce à la blessure de Benjamin Boyet. Si je n'étais pas parti, cela n'aurait pas changé ma vie. J'ai simplement la chance de pouvoir conclure ma saison en beauté.

On a le sentiment de vous avoir vu franchir un vrai cap pour votre première saison en tant que titulaire dans une équipe de Top 14...

J.W. : Ma grosse sensation de progression n'est pas physique, ni technique. On peut toujours, et même presque facilement, faire dix kilos de plus en muscu. Ma progression se situe plutôt dans l'approche du match et dans sa gestion. Travailler aux côtés d'Andrew Mehrtens, qui est un grand stratège, m'a ouvert les yeux sur la nécessité de prendre du recul pour pouvoir effectuer le bon choix. J'ai aussi beaucoup appris avec Simon Mannix, lui aussi un ancien ouvreur, avec Pierre Berbizier, mais également ces dernières saisons avec Jeff Dubois ou Agustin Pichot qui, malgré son fort caractère, demeure l'un des meilleurs stratèges du monde... J'ai essayé de puiser dans toutes leurs expériences pour m'en nourrir.

On croit aussi savoir que vous n'êtes plus le forcené de l'entraînement que vous étiez auparavant.

J.W. : C'est vrai. Avant, j'avais cette obsession de l'entraînement. Voir qu'Andrew Mehrtens, l'un des meilleurs demis d'ouverture de l'histoire du rugby, travaillait très peu a modifié mon approche. J'ai vu qu'il existait d'autres façons de travailler que la répétition à outrance. Ma plus grosse satisfaction, aujourd'hui, est de savoir comment faire mieux jouer mes partenaires. Je suis aujourd'hui capable de dire comment tel joueur aime prendre tel ballon, comment il se comporte lorsqu'il est fatigué... C'est ma vision du poste. Le demi d'ouverture n'est pas là pour faire de grandes percées, mais pour faire jouer les autres.

Finalement, avec le temps, Jonathan est-il devenu Wisniewski ?

J.W. : Oui, je crois. Toutes ces sources d'inspiration me servent à trouver ma personnalité. Je sais que je ne serai jamais François Trinh-Duc, qui aime le défi ballon en main, qui attaque très près de la ligne d'avantage. En ce qui me concerne, j'apprécie plus des joueurs comme Carter ou Larkham, qui jouent très profond et ne s'engagent que rarement, mais toujours à bon escient. Je me ressens plus dans cet état d'esprit. Et puis, ce n'est pas en faisant des chisteras ou des passes derrière la tête que l'on gagne des matchs de haut niveau...

Après Mehrtens, vous allez côtoyer au Racing-Metro un certain Juan-Martin Hernandez, qui n'a jamais masqué sa préférence pour le poste d'ouvreur. Cela vous inquiète-t-il ?

J.W. : Cela m'a travaillé vers Noël, lorsque sa venue a été évoquée. Je l'ai ressenti comme un manque de confiance en moi. J'en ai discuté avec mon président et mon manager. Leur discours a été très clair et m'a convaincu de rester. J'ai confiance en moi, je pense avoir donné des garanties cette saison. Les entraîneurs me connaissent et savent que je peux aussi jouer arrière, tout comme Hernandez d'ailleurs. La méthode de Pierre Berbizier est de placer tous les joueurs qu'il juge intéressant sur le terrain. Je n'ai qu'une envie, c'est de travailler. Il est toujours plus intéressant de se frotter à Juan-Martin Hernandez que d'être seul à son poste. Cela sera une fierté d'être en concurrence avec lui et de chercher que je peux apporter autant, et même peut-être plus que lui.

Dans quel secteur pensez-vous encore disposer d'une marge de progression ?

J.W. : Andrew Mehrtens, qui a trente-sept ans, dit toujours qu'il apprend à chaque match. Le poste d'ouvreur évolue en permanence, en fonction des défenses, en fonction des règles... Je crois que c'est un poste où l'on n'arrive jamais réellement à terme. Il n'y a jamais un jour où l'on se dit : ça y est, je suis arrivé, contrairement à des postes qui touchent à des sciences plus exactes, la touche ou la mêlée.

Pourtant, dans le jeu actuel, l'ouvreur se trouve de plus en plus déchargé de ses prérogatives par son premier centre, et surtout par le demi de mêlée...

J.W. : C'est vrai, mais au Racing-Metro, c'est encore sur l'ouvreur que pèse la responsabilité des choix.

Pour revenir au match, quels seront vos objectifs dans la gestion de ce France-Uruguay ?

J.W. : Ce sont les coachs qui ont fixé des objectifs. Le mien sera d'essayer de les faire respecter. Il s'agira de ne pas prendre d'essai d'abord, et ensuite de mettre du rythme, du volume de jeu, de mettre la main sur le ballon, de prendre des initiatives, des risques. Je serai le garant de la manière dont nous chercherons à le faire.

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