Haka: Et si les Bleus préparaient quelque chose ?
Dimanche soir, après le revers contre l’Irlande, il semblait peu probable que les joueurs du XV de France mettent en place une riposte au Haka. "Avec cette défaite, on n’est pas en position pour faire quelque chose", confiait Yoann Maestri. Et si les Bleus manigançaient finalement une réponse au cri maori des All Blacks ?
Samedi soir, peu après 21 heures, une partie du Millennium aura poussé son cri du coeur: la Marseillaise. Le XV de France sera alors en transe et Yoann Maestri frottera certainement sa caboche contre celle de Pascal Papé. Pendant ce temps, un autre cri du coeur imposera aux 70.000 spectateurs un silence général: le Haka, ce cri maori, instauré par les All Blacks lors de leur tournée européenne de 1905, dévoué au dieu soleil. Cette ronde guerrière pourrait sembler surannée, voire même un folklore marketé. Mais non, le Haka demeure une religion dont les All Blacks, leurs adversaires et le rugby ne peuvent se défaire.
Fofana: "Il y a des Haka qui m'ont transcendé"
Le Haka est une minute hors du temps. Mené par un Maori, le talonneur Keven Mealamu depuis le début du Mondial, il cristallise l'énergie des All Blacks, peut faire baisser certains regards ou révulser les orbites. Au moment où le meneur de la ronde s'agitera au coeur de la Fougère argentée, une question kidnappera l'esprit de nos Bleus: quel Haka soufflera sur le Millennium ? Le traditionnel "Ka Mate" ou le "Kapa o Pango", cérémonial encore plus paralysant. Quoique… Chacun le vit à sa manière, confie le trois-quarts centre Wesley Fofana. J’en ai vécu quatre. Il y en a qui m’ont transcendé. D’autres qui m’ont rien fait. Mais ça ne m’a jamais inhibé. Tu le vis sur le moment mais je ne pense pas que ça enlève les moyens à quelqu’un.
Jauzion: "2007, un moment qui restera longtemps gravé"
Toutes les postures ont été imaginées pour faire face au cri maori: le dos tourné, en cercle, camouflé par les chants patriotes à l’image du Swing Low, Sweet Chariot de Twickenham. Ou en avançant lié, au couleur du drapeau tricolore, à l’image des Français lors du quart de finale de la Coupe du monde 2007, ici même, à Cardiff, un moment qui restera longtemps gravé dans la mémoire de Yannick Jauzion. De manière générale, le Haka impose surtout le respect des adversaires, exception faite peut-être des Gallois (*). Que dire enfin de cette flèche - interprétée à tort comme un V - en finale de la Coupe du monde 2011 ! Une marche main dans la main pour venir frapper le Kapa O Pango mené par Piri Weepu. C'est venu tout seul, raconte Fabien Barcella. On s'est réuni avant le match pour en discuter et pour faire un truc qui nous tenait à coeur. Ce n'était pas pour faire comme les autres équipes de France. On sentait le besoin de le faire. On était trente unis dans ce match là. J'avais envie d'avancer. On était bloqué aux 50 mètres. Cela aurait été bien d'aller un peu plus près.
Yachvili: "En finale en 2011, on a vu dans leur visage qu'ils étaient un peu surpris"
Comprimés autour de Dusautoir, les Tricolores avaient outrepassé le règlement interdisant aux adversaires des Néo-Zélandais de franchir la ligne médiane. S'ils avaient pu, les coéquipiers de Dimitri Yachvili auraient sauté à la gorge de leurs adversaires. Dès le Haka, on leur a montré qu'on allait être présent, on voulait leur mettre la pression, se souvient Dimitri Yachvili. On a vu dans leur visage qu'ils étaient un peu surpris. C'était un grand moment d'émotions. On a assumé parce qu'on a joué de la 1er à la 80e minute. Avec ce regard incomparable d'un homme possédé par le sacrifice, Thierry Dusautoir s'était lui-même retrouvé débordé par l'énergie de son groupe. Je sentais mes coéquipiers derrière moi, nous avait confié le capitaine du XV de France après la finale. Un peu trop même (sourire). A un moment, il a fallu les calmer. Ils voulaient aller embrasser les All Blacks. Les joueurs ont voulu faire quelque chose, notamment ceux qui n'avaient pas vécu 2007. Quelqu'un auprès de nous, dont je tairai le nom, a émis cette idée là.
Maestri: "En 2011, tu peux faire ce que tu veux, un V, mais tu l'as perdu la finale"
Et samedi soir alors ? Quelle idée pourrait bien jaillir de l’imagination du XV de France ? Dimanche dernier, à l’issue de la défaite contre l’Irlande, Yoann Maestri n’était pas vraiment emballé en envisageant une riposte. Pour moi, c’est du package tout ça, lâchait le deuxième-ligne toulousain en quittant le Millennium. En 2011, tu peux faire ce que tu veux, un V, mais tu l’as perdu la finale. Au bout d’un moment, on n’est pas en position pour faire quelque chose. On ne va pas faire un trou (sourire). Et pourtant, ce jeudi matin, même si aucun jour n’a souhaité s’étendre sur le sujet, Wesley Fofana a tout de même esquissé un léger sourire en glissant, vous verrez samedi… Alors quoi qu’ils fassent, les regards des Bleus ne seront pourtant plus les mêmes. Et le Millennium aura la chair de poule. E Kino Nei Hoki : Partez au combat !
De notre envoyé spécial à Newport, Vincent PERE-LAHAILLE
(*) En 2006, les Gallois avaient demandé que le Haka ait lieu avant les hymnes. Pour protester, les Néo-Zélandais l'avaient alors effectué dans leurs vestiaires. Les Gallois estimaient que l'attente du Haka avait pour conséquence d'expédier les hymnes notamment le leur, le Land of my fathers.
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