A Clermont, on oscille entre fierté et tristesse après l'annonce de Saint-André

Les sept sélectionnés clermontois ont pris la pose avec le sourire en début d’après-midi au stade Marcel-Michelin, sous le soleil auvergnat. Des sourires timides et une joie mesurée, gâchée même par la tristesse de laisser en route ceux qui ne feront pas partie du voyage.

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Le grand absent clermontois est l’ouvreur Camille Lopez, titulaire pendant le Tournoi, adoubé par Philippe Saint-André, avant de quitter l’équipe sur une blessure au genou et un imbroglio entre médecins. L’ouvreur fait peut-être les frais de cette brouille entre le staff médical des Bleus et son chirurgien, et paye probablement ses récentes difficultés en club. Revenu précipitamment de blessure pour participer aux phases finales européennes, titulaire surprise en finale de Coupe d’Europe avec un match seulement dans les jambes, Lopez a moins pesé qu’en début de saison avec son club, et ses coéquipiers avaient évidemment une pensée pour lui.

Pensées pour les absents

Wesley Fofana était sincèrement peiné pour le natif de Mauléon, finalement devancé dans la hiérarchie par Trinh-Duc, Michalak, Tales et Plisson. Je suis forcément très triste pour lui. Un peu surpris mais c’est le sport… ça m’a fait quelque chose de le voir triste d’autant plus qu’on est assez proches. Mais je connais son caractère, je sais qu’il ne lâchera rien jusqu’à la fin de l’année, dans le sport ça va très vite, on ne sait jamais…

Partagé lui aussi entre ses regrets pour Lopez et la satisfaction de retrouver en sélection son pote François Trinh-Duc, Morgan Parra avait du mal à confier sa joie de participer à sa deuxième Coupe du monde. Malgré une saison hachée par les blessures, l’ancien berjallien sera probablement du rendez-vous en Angleterre, même s’il reste prudent. La route est encore longue pour faire partie du groupe de 31, mais je suis très fier de faire partie de cette pré-selection. Même si c’est très dur, c’est quelque chose de beau à vivre. C’est passionnant de partager une aventure humaine, malgré des hauts et des bas, c’est quelque chose d’énorme à vivre.

Avant d’avoir une pensée pour son complice montpelliérain, appelé de dernière minute: Je le connais bien, je l’apprécie et je suis content pour lui. Malgré l’année galère qu’il a vécue avec cette blessure il s’est accroché, il y a toujours cru, et il revient après de gros matches en club.

Avec un Belge et un Fidjien

Parmi les absents, le pilier Thomas Domingo, privé de la Coupe du monde 2011 sur blessure, manquera celle-ci aussi, doublé dans la hiérarchie par le Toulonnais Chiocci et son coéquipier Vincent Debaty. Le "belge" est resté très mesuré, et avait une pensée pour son partenaire. Je lui ai dit un petit mot, mais c’est toujours délicat. Moi je suis heureux, lui est déçu c’est normal, ça aurait été l’inverse c’était pareil, et ce ne sont pas des moments faciles.

Vincent Debaty, longtemps catalogué impact player, récolte les fruits de sa remise en question et de ses efforts personnels. Devenu titulaire en club et en équipe de France, le colosse blond jouera sa première Coupe du monde. Je la regardais à la télé gamin, je revois l’équipe de France faire des exploits contre les All Blacks, ce sont des moments forts et un grand événement. Je suis super content et je vais me donner à fond pendant la préparation pour rester dans le groupe jusqu’à la fin.

Le père de famille a eu une pensée pour ses trois filles, qu’il va probablement quitter quelques longs mois. Mes filles sont contentes pour moi, je leur ai expliqué que c’était un moment très important dans ma carrière, quelque chose de très grand. Et elles ont l’habitude de me voir partir pendant les tournées ou le Tournoi. Je leur ai dit que si je pouvais ramener la Coupe, ce serait encore mieux…

Frustré de ne pas avoir été appelé en début de Tournoi, le pilier sait que sa prestation face à l’Angleterre a pesé. Comme pour son coéquipier Noa Nakaitaci. L’ailier serait le premier Fidjien d’origine à jouer une Coupe du monde avec l’équipe de France. C’est quelque chose que tous les joueurs français ont envie de vivre. Je n’ai pas encore eu ma famille, mais je pense qu’ils sont heureux et fiers de moi. J’espère que mon papa ne va pas pleurer…

Des partants certains et une demi-surprise

Au fil de performances magistrales en club depuis le début de la saison, Nakaitiaci est devenu incontournable en club, puis en sélection. C’était déjà le cas pour le troisième ligne Damien Chouly, le centre Wesley Fofana et le talonneur Benjamin Kayser. Ces derniers faisaient partie des partants quasi certains, et vivront leur première Coupe du monde.

J’ai hâte de découvrir cette compétition, confie Wesley Fofana. Je n’ai pas encore connu ça, donc j’appréhende un peu. On sera loin de nos proches, à souffrir ensemble. Mais ce sera aussi beaucoup de bonheur je pense.

C’est particulier d’accueillir une nouvelle très individuelle et très personnelle avec tout un groupe, parce qu’il y a des déçus donc c’est délicat, tempère le talonneur Benjamin Kayser. Mais c’est un immense moment de fierté, parce que je n’ai jamais joué de Coupe du monde. C’est un ticket pour avoir l’occasion de faire quelque chose d’exceptionnel dans une carrière donc c’est un grand moment de bonheur.

Ancien joueur de Leicester, Kayser est l’un des plus "anglais" de l’équipe de France, et aura aussi la chance de jouer cette compétition dans le pays de son épouse et de sa belle-famille. Les Anglais ont une façon bien particulière de célébrer leur fierté de la nation et d’organiser cet événement, donc en termes d’engouement ça risque de ne pas être triste. C’est un plus de jouer en Angleterre.

Le deuxième ligne Sébastien Vahaamahina est peut-être celui que l’on attendait le moins, mais il a su élever son niveau de jeu et d’exigence cette saison pour doubler dans la dernière ligne droite son concurrent toulonnais, Romain Taofifenua. Fidèle à lui-même, il accueillait la nouvelle avec beaucoup de distance. Je n’étais pas le favori, mais j’ai joué sans penser à y être, c’était le meilleur moyen de jouer mon meilleur rugby. Je n’arrive pas à me dire encore que j’y suis vraiment, je ne sais pas trop quoi penser… C’est Benjamin Kayser qui me l’a dit, je n’ai pas suivi l’annonce, je ne m’y attendais pas vraiment.

Couvé par ses partenaires expérimentés Jamie Cudmore et Julien Pierre, le Néo-Calédonien rend hommage à son club, qui est pour beaucoup dans cette sélection. En arrivant ici j’étais loin. J’avais mal fini la saison dernière avec Perpignan et je savais que ce serait dur de revenir en équipe de France. Mais c’est ce que j’étais venu chercher à Clermont. L’ASMCA m’a beaucoup aidé, pour progresser et évoluer dans mon jeu. Jouer tous les week-ends, en Coupe d’Europe, en finale, ça compte…

Et avant de penser à son probable affrontement en poule face au Canada de son coéquipier Jamie Cudmore, Vahaamahina veut très vite mettre de côté cette récompense personnelle. Il a une saison à bien finir avec son club.