Benazzi : "J'ai aplati sur la ligne"

Par Rugbyrama
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Acteur de trois Coupes du monde (1991, 1995, 1999), le troisième ligne Abdellatif Benazzi garde un souvenir impérissable du mondial sud-africain de 1995, malgré la cruelle défaite en demi-finale où il se vit refuser un essai. Mais dans un contexte hautement politique, l'essentiel était ailleurs...

Quelle image gardez-vous de cette Coupe du monde ?

Abdellatif BENAZZI: C'est certainement celle qui m'a le plus marqué, qui m'a laissé un souvenir indélébile. Dès que je croise quelqu'un, c'est un sujet qui revient inlassablement. Il y a, évidemment, toute l'histoire autour de Nelson Mandela portant ce maillot, icône de l'apartheid transformée en symbole de la réconciliation. Et puis il y a cette demi-finale, qui fait partie de l'histoire de l'équipe de France mais aussi de mon histoire personnelle. La symbolique, cette fois-ci, serait plutôt celle des dix centimètres qui en réalité n'existent pas.

Vous aviez donc aplati lors de cette demi-finale, à deux minutes de la fin (essai qui ouvrait les portes de la finale aux Français, finalement refusé par monsieur Bevan) ?

A.B: Oui, j'ai aplati sur la ligne. Mais dans le vestiaire, après le match, je dis aux gars que je n'ai pas aplati, pour qu'il n'y ait pas de frustration et que tout le monde se tourne vers le match pour la troisième place contre les Anglais, que l'on avait pas battus depuis six ans. Ce que je regrette le plus, en fait, c'est que l'arbitre refuse très vite l'essai, sans même consulter ses assistants. Et puis l'essai des Springboks n'est pas valide. François Pienaar, que j'ai connu plus tard comme entraîneur aux Saracens, me l'a confirmé...

Récemment, Pierre Berbizier, le sélectionneur de l'époque, parlait de la victoire sud-africaine comme "d'une des plus grandes escroqueries sportives de l'histoire", invoquant une possible intoxication alimentaire la veille du match. Qu'en est-il ?

A.B: À vrai dire, je ne m'en souviens pas. Je n'ai pas été marqué par cela. L'arbitrage a par contre été très "limite". Il nous refuse trois essais, et n'accorde jamais un essai de pénalité sur une série de mêlées où on les met au supplice. Et puis, il y a cet avant-match interminable, en raison des trombes d'eau qui s'abattaient sur Durban. Une heure et demie à attendre dans le vestiaire que la décision soit prise de jouer ou non ce match. On s'occupe comme on peut, en buvant du café et en répétant mentalement des phases de jeu. Nous voulions vraiment jouer ce match, même sous le déluge.

Le contexte politique sud-africain, avec la fin de l'apartheid, a-t-il été pesant ou stimulant ?

A.B: À vrai dire, nous n'en avons pas vu grand chose. Pierre Berbizier était quelqu'un de professionnel avant l'heure. Il nous a vraiment isolé lors de cette Coupe du monde. De fait, l'équipe s'est concentrée uniquement sur le sportif, sans vraiment se rendre compte des enjeux politiques. Tout ça, nous ne l'avons compris que lors de la finale, où nous étions invités. Là, on en a pris plein les yeux. C'est un moment extrêmement fort, qui a d'ailleurs largement contribué à atténuer ma déception de l'essai refusé en demi-finale. J'ai compris lors de la finale que cette Coupe du monde représentait bien plus qu'un événement sportif. Finalement, c'est une bonne chose pour ce pays, et l'histoire est très bien comme cela.

Cette équipe de France était-elle la plus forte de l'histoire, comme on a coutume de le dire ?

A.B: Je crois, oui. En tout cas, parmi les trois Coupes du monde que j'ai joué, c'est une certitude. On était extrêmement bien préparés, confiants en notre potentiel et véritablement concentrés sur notre objectif. Et puis devant, on était très forts physiquement. On savait qu'on pouvait battre n'importe qui.

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