Kelly Brown, le capitaine bègue

Par Julian Vicente
  • Kelly BROWN / Scott JOHNSON - 22.01.2014 - Rugby - Presentation des Capitaines - Tournoi des 6 Nations -Londres
    Kelly BROWN / Scott JOHNSON - 22.01.2014 - Rugby - Presentation des Capitaines - Tournoi des 6 Nations -Londres
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Capitaine de l'Ecosse lors du Tournoi des six nations, le flanker Kelly Brown présente la particularité de bégayer depuis l'âge de sept ans, un handicap qui ne l'empêche toutefois nullement de parler au nom de l'équipe.

"Dans ma vie sportive, le bégaiement ne m'a jamais posé de problème. Il y a toujours eu des blagues de mes coéquipiers. Cela ne me dérange pas car cela montre qu'ils me traitent normalement. Je me moque aussi souvent de moi-même", assure ainsi le leader écossais qui s'apprête à honorer sa 62e sélection, samedi contre l'Angleterre. Difficile pourtant d'imaginer ce handicap compatible avec les discours virils et fleuris qu'un capitaine doit tenir à des troupes gonflées de testostérone dans l'intimité du vestiaire. Désormais aux Saracens depuis 2010, avec lesquels il a été champion d'Angleterre en 2011, le troisième ligne né à Edimbourg et révélé à Glasgow se bat pourtant quotidiennement et courageusement contre son bégaiement. Celui-ci s'est manifesté lorsque son institutrice lui a un jour demandé de se lever au milieu de la classe pour raconter ses vacances au ski.

Je ne me faisais pas embêter à l'école

"J'ai plutôt de la chance parce que je suis costaud, donc je ne me faisais pas embêter à l'école", plaisante Brown, doté effectivement d'un beau gabarit (1,94 m, 109 kg). "Je sais que ça fait partie de moi. Les autres joueurs savent que c'est quelque chose sur laquelle je travaille tous les jours, et que je vais continuer. Dans un discours, il faut toujours que je choisisse avec attention mes mots. A la fin, on finit par dire ce qu'on sait dire, pas ce qu'on veut", expliquait-il ainsi avant le début du Tournoi. En public, le joueur à l'intonation hachée et haletante semble ainsi faire des efforts surhumains pour contrôler son phrasé. Et Brown, dont le père bégaie aussi, de raconter un quotidien d'artifices et de mensonges à soi-même pour éviter de se confronter à son handicap, jusqu'à ce sommet, lors de l'hiver 2010, et la prise de conscience.

"On m'avait demandé de faire une interview. Mais j'ai été tellement mauvais que j'ai rappelé ensuite pour demander qu'elle ne soit jamais diffusée, racontait-il encore. Cela a été comme un révélateur. J'ai dit: ok, maintenant il faut que je prenne les choses en main. Depuis ce jour, le matin, je me lève et je fais mes exercices de respiration. Je sais que si je peux le faire, je pourrai contrôler des prises de parole. Je ne veux pas que mon bégaiement soit une excuse pour ne pas pouvoir faire quelque chose. Mais c'est toujours là, et ça le sera probablement toujours", poursuivait-il.

Je ne bégaie pas quand je crie

Membre de l'association britannique contre le bégaiement (BSA), Brown ne se voile désormais plus la face. "Ce n'est pas un gros handicap comparé à d'autres, c'est sûr, mais réussir à se tenir comme ça tous les jours devant des gens et parler, ça force le respect, admirait ainsi son sélectionneur Scott Johnson. En ayant réussi à surmonter une telle adversité, ce garçon est un exemple." "Je trouve que je ne bégaie pas quand je crie, et j'ai tendance à crier beaucoup sur le terrain", souriait encore le joueur, qui sait donc se faire entendre. Il paraît aussi que Kelly Brown, également connu comme un homme affable, est un excellent chanteur de rock et que ses interprétations parfaites font des ravages chez ses coéquipiers lors des mises au vert.

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