Le XV de France ne voit vraiment pas clair dans son jeu

  • Maxime Machenaud - ecosse france - 8 mars 2014
    Maxime Machenaud - ecosse france - 8 mars 2014
Publié le Mis à jour
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A 18 mois du Mondial, le XV de France balbutie totalement son jeu et inquiète fortement. Et le bilan de Saint-André suscite une forte interrogation.

2014 devait concrétiser deux années d'apprentissage du XV de France mais le succès miraculeux (19-17) samedi en Ecosse a mis en lumière ses difficultés persistantes à poser les bases de son jeu à 18 mois du Mondial. Certes, comme le martèle le manager Philippe Saint-André, les Bleus ont récolté plus de victoires en quatre matchs que lors de la catastrophique année 2013, certes ils ont fait preuve en Ecosse d'une rare discipline. "L'an dernier, parfois le contenu était très bon mais on n'arrivait pas à gagner. Là, on gagne", veut retenir PSA.

Avec 44% de victoires sur ses 25 premiers matchs, il présente toujours le plus mauvais bilan d'un entraîneur du XV de France dans l'ère professionnelle débutée en 1995. Deux ans après leurs prises de fonctions, ses trois prédécesseurs avaient gagné au moins une fois le Tournoi en réalisant le Grand Chelem (Villepreux-Skrela en 1997 et 1998, Laporte en 2002, Lièvremont en 2010). Aujourd'hui, avant son dernier match contre l'Irlande, le XV de France a une chance seulement mathématique de remporter le Tournoi. A la différence de leurs rivaux, les Bleus montrent dans le jeu une grande inconstance et une grande fébrilité. S'ils sont capables de fulgurances salvatrices comme contre l'Angleterre, ils ont rarement été capables depuis deux ans de poser leur emprise sur un match.

Des questions sans réponses

A Murrayfield comme à Cardiff il y a quinze jours (défaite 27-6), même la conquête, pilier historique et habituelle bouée de sauvetage du jeu français, a été défaillante. "On a un peu de mal à savoir où on est en terme d'identité de jeu. Il ne me semble pas qu'on soit dans une dynamique comme celles d'autres nations, à savoir beaucoup de mouvement, d'ambitions de jeu. Il faut encore créer ce rugby qui permet d'être identifié", estime Pierre Villepreux, entraîneur du XV de France avec Jean-Claude Skrela entre 1995 et 1999. "Les quelques traits du jeu sont très programmés: on occupe le terrain, on joue très près des avants, près des endroits où l'on a gagné le ballon, derrière les rucks que l'on enchaîne. Mais ce n'est pas significatif d'un rugby moderne", estime l'ancien arrière international, un des rares anciens entraîneurs nationaux à accepter de s'exprimer sur le sujet.

"On n'a rien vu. (...) On peut ne retenir que le résultat mais j'ai peur qu'on le paye plus tard", estimait dimanche dans L'Equipe Pierre Berbizier, qui a dirigé la sélection entre 1991 et 1995. "On en déduit qu'il n'y a pas de plan de jeu, mais je n'y crois pas. Les entraîneurs ont l'expérience du haut niveau, il doit y avoir un problème dans la transmission. (...) J'ai peur qu'on termine ce Tournoi avec plus de questions que de réponses". Le projet de jeu prôné par Saint-André et ses entraîneurs Yannick Bru et Patrice Lagisquet est basé sur la volonté de créer le danger par l'initiative et l'adaptation, dans l'ordre comme dans le désordre.

Cercle vicieux

Mais comme l'a encore montré le match d'Edimbourg, les Bleus peinent à la fois à orchestrer le jeu pour répliquer les combinaisons répétées à l'entraînement et à créer du déséquilibre dans le désordre. Le XV de France semble pris dans un cercle vicieux. Les neuf matchs sur onze sans victoire de 2013 ont inhibé les joueurs, coupables d'erreurs tactiques et techniques qui sanctionnent la majorité de leurs initiatives. Et en l'absence des joueurs d'expérience censés guider la nouvelle génération (Dusautoir, Szarzewski, Fofana, Fritz, Nyanga blessés), le groupe reste englué dans ses doutes.

"Rien ne sera facile avec ce groupe, tout se fait dans la difficulté", confie l'entraîneur Yannick Bru. "Rien ne sera facile avec personne parce que personne ne nous fait de cadeaux, ni à l'intérieur, ni à l'extérieur. Mais il y a une grosse unité entre les joueurs et le staff", ajoutait-il, conscient que "ce sera un exploit de dominer l'Irlande au Stade de France". Maigre consolation: sous le feu des critiques à mi-chemin de la Coupe du monde, le XV de France se retrouve dans la situation qui lui réussit le mieux, celle du "seul contre tous".

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